E.Hopper, Le Phare , 1937

E.Hopper, Le Phare , 1937

mardi 16 juin 2020

Les aventures du regard : La montagne sacrée par Alejandro Jodorowsky

Les élèves ont travaillé sur le sujet de réflexion suivant : 

Notre regard nous permet d'accéder au tangible (la table que je vois et que je peux toucher) et à l'utile (ce qui me permet de poser des objets dessus), mais aussi au lointain (les étoiles) et à l’irréel (les rêves). Sans cette capacité il n’y aurait tout simplement ni art ni création.



L’art, sa création comme sa contemplation, est une aventure du regard.



Pour cette semaine, je vous propose de regarder les œuvres suivantes qui offrent de telles aventures : 



 
et de m’envoyer ensuite une œuvre que vous connaissez et qui provoque le même effet sur vous en écrivant quelques lignes pour justifier votre choix.

Voici la réponse d' U. Roncière : 


J’ai d’abord pensé à parler d’une peinture ou d’une photographie du regretté Zdzislaw Beksinski, mais je n’ai pas pu porter mon choix sur une ou l’autre de ses créations, qui sont très nombreuses. Voici un lien vers un « musée virtuel » permettant de parcourir une grande partie de son œuvre : http://www.dmochowskigallery.net/ ; et un autre vers une vidéo de présentation de la chaîne Alt 236 : https://www.youtube.com/watch?v=3vaq3Y_cnfQ.
            Mais finalement je voudrais plutôt évoquer La Montagne sacrée, un film américano-mexicain adapté du roman Le Mont Analogue de René Daumal et réalisé par le franco-chilien Alejandro Jodorowsky. Jodorowsky est né au Chili en 1929, mais il quitte le pays en 1953 pour se rendre à Paris afin de rencontrer les surréalistes, comme il le raconte dans son film plus ou moins autobiographique Poesia sin fin. Il est vite très actif artistiquement, fréquentant Roland Topor et le mime Marceau tout en pratiquant la performance et les arts de la scène, en s’essayant à la bande dessinée et en s’intéressant à l’alchimie, au tarot divinatoire et à la psychanalyse. En 1965, il fonde au Mexique le théâtre d’avant-garde de Mexico, où il réalise trois longs-métrages. La Montagne sacrée, en 1973, est le dernier de ces films.  L’histoire est celle du périple des personnes « les plus puissantes de la Terre » qui voyagent en compagnie d’une sorte de nouveau Christ et d’un chimpanzé, menés par un vieil alchimiste joué par Jodorowsky lui-même, afin de monter au sommet de la Montagne sacrée et d’y découvrir le secret de l’immortalité. En réalité, ce qui importe n’est pas tant le scénario que l’expérience visuelle qui est proposée, psychédélique, hallucinée et fourmillante de détails imaginatifs, souvent absurdes (le chameau dans l’antre de l’alchimiste) et parfois cruels (le chef de la police qui collectionne les testicules de ses employés). Le spectateur passe d’image en image, toutes plus étranges, déroutantes et construites les unes que les autres. L’engagement politique n’est toutefois pas absent, avec notamment une dénonciation voilée de l’impérialisme américain ou une reconstitution sanglante de l’invasion du Mexique par les conquistadors, les Aztèques étant ici incarnés par des grenouilles et les espagnols par des lézards. La symbolique chrétienne est aussi beaucoup utilisée et souvent mise à mal, comme lors de la scène de la procession de pénitents portant des lapins écorchés et crucifiés. Ce film est donc une expérience visuelle marquante, en plus d’être caractéristique des années 1970 et de l’état d’esprit libertaire de la contre-culture de cette époque.












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