E.Hopper, Le Phare , 1937

E.Hopper, Le Phare , 1937

mardi 6 juin 2023

Pourquoi l'art? (5)

Dès qu'il y a des humains, il y a de l'art. C'est ce qu'atteste l'étude des diverses cultures ou de la préhistoire. Mais cette activité, à la différence de la chasse ou de l'agriculture ne sert pas à survivre. Dès lors la question se pose de la raison d'être de cette activité aussi essentielle que dénuée de fonction pragmatique. Dans le cadre d'un cours portant sur le rôle de l'écrit dans l'accès du public à l'art, les élèves ont été invités à donner leur réponse argumentée et personnelle à cette question, en s'appuyant sur l'analyse d'une oeuvre.

L’oeuvre de Fernand Khnopff intitulée I lock my door upon myself est une huile sur toile de 72x140cm est exposée au Petit Palais, elle date de 1891 et s’inscrit dans le mouvement du symbolisme.

Au centre-gauche de cette peinture se trouve une femme seule, face à nous dont la posture est contemplative, lâche. Ses yeux très clairs, vitreux font transparaître un regard dans le vague, absent, contemplatif comme sa posture. L’œuvre contient de nombreux symboles. On retrouve dans l’arrière-plan, une sculpture du visage d’Hypnos le dieu du sommeil dans la mythologie grecque. Il y a trois lys rouges fanés disposés au premier plan. Les autres objets sont difficiles à identifier. Sur la table est étendue une nappe noire pouvant évoquer le deuil. A droite, le tableau d’un paysage avec une figure sombre, à l’allure contemplative également, est accroché en arrière-plan. Il semble y avoir deux miroirs de forme arrondie à gauche, ainsi que ce qui semble être un lys blanc affiché sur un tableau. Il y a aussi ce qui ressemble à une porte.

De nombreux objets sont difficiles à identifier, l’aspect général de la toile est flou, les couleurs sont peu contrastées, ce qui rend cette peinture mystérieuse. Elle évoque le sommeil ce qui souligne encore cette impression d’irréalité. On ressent une certaine solitude, que confirme le titre qui pourrait se traduire par « je ferme ma porte sur moi-même » et peut-être même un forme de mal-être. Il faut savoir que le titre de l’œuvre est issu du poème « Who shall deliver me ? » de Christina Rossetti, qui fait part d’un sentiment d’enfermement sur soi. On peut donc considérer que les symboles du tableau ramènent à ce même sentiment.

Cette œuvre est donc un autre moyen que l’écrit de traduire un état d’âme. On peut aussi considérer ce tableau comme une illustration du poème.

Un but de l’art est donc ici l’expression d’un monde intérieur. Et le temps passé à créer l’œuvre amène une pleine conscience de ces sentiments, une méditation sur ceux-ci. L’art met des mots et des images sur l’indicible et l’invisible pour partager cette contemplation avec le public. Peu importe ce que l’on ressent, l’art permet d’aller au bout de ce ressenti et de célébrer dans le réel ce qui appartient à notre irréel. L’art permet d’admirer ce qui est, ce que l’on est.

Par C. P. 


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